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La participation de la jeunesse à la vie de la société

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La communauté bahá’íe du Canada est une communauté confessionnelle vouée à l’amélioration de la société. Un élément central de notre contribution à ce but est le travail que nous faisons avec des milliers de jeunes de tous âges et milieux pour qu’ils développent leurs talents et leurs capacités. Notre expérience nous permet de mieux comprendre le processus par lequel les jeunes entreprennent de participer à la société, et le présent document représente un premier effort pour discuter certaines de nos observations afin de contribuer au discours général sur le rôle de la jeunesse dans la société.


Le concept de « participation de la jeunesse » peut être défini de diverses façons, et dans le présent document, nous l’utiliserons dans un contexte particulier. Un aspect distinctif de la participation de la jeunesse est qu’il comporte deux buts: le développement personnel de chaque personne et sa contribution à l’amélioration de la société. D’une façon fondamentale, ce but plus général donne forme aux approches et aux méthodes utilisées pour engager les jeunes, et nous discuterons de certaines d’entre elles un peu plus loin. Cette perspective aide ceux qui désirent en apprendre plus sur l’autonomisation des jeunes, pour qu’ils contribuent à la société, à éviter de réduire leur travail à une série d’étapes ou à de simples techniques. Pour cette raison, la communauté bahá’íe cherche à mieux comprendre le but de la participation des jeunes à la vie de la société, et comment les efforts faits pour obtenir leur participation les aident à réaliser ce double but.

Les idées qui ont informé les efforts de la communauté bahá’íe pour obtenir la participation des jeunes, incluent certains concepts qui ont trait à la nature de la période de la jeunesse. Les premières conversations avec les jeunes pour susciter leur enthousiasme pour un programme ou une activité, sont déjà influencées par une meilleure compréhension des caractéristiques de cette période de la vie. Les enseignements bahá’ís demandent aux adolescents d’être « animés d’intentions claires », ajoutant vous devez « vous distinguer […] par votre sainteté et votre détachement, par la sublimité de vos buts, votre magnanimité, votre détermination, votre noblesse d’esprit, votre ténacité, l’élévation de vos desseins et de vos qualités spirituelles ». Si nous associons habituellement les programmes et les services offerts à la jeunesse à des notions de spontanéité et d’excitation, une approche fondée excessivement sur de telles idées entraine l’utilisation de motivateurs plus superficiels pour chercher à les intéresser. Une appréciation de la capacité innée des jeunes à agir de façon systématique a aidé à déterminer comment ceux qui participent aux programmes offerts par la communauté bahá’íe les présentent à de nouveaux jeunes et encouragent leur participation.

Notre approche pour obtenir la participation des jeunes a bénéficié d’une réflexion sur les attitudes que nous désirons encourager chez eux, alors qu’ils prennent part à des activités de construction communautaire. Nous nous posons plusieurs questions qui sont interreliées. Quand ils terminent un programme, est-ce que les jeunes seront satisfaits des conditions qui existent dans le monde? S’ils ne le sont pas, que croient-ils devrait être changé? Sententils qu’ils ont les moyens de contribuer à de tels changements? Seraient-ils aussi heureux d’apprendre à travailler pour le progrès de l’humanité qu’ils le seraient d’apprendre à gérer leur propre croissance intellectuelle et spirituelle?

Un autre concept qui a influencé nos efforts est celui du service de la collectivité. Les jeunes ont plaisir à parler de ce qui les intéresse, de leurs champs d’intérêt et de leurs aspirations, mais un grand nombre d’entre eux sont aussi très heureux qu’on leur demande de réfléchir à leurs rapports avec les autres, comme les membres de leur famille, leur communauté, leurs pairs. Nous avons constaté que les jeunes ont beaucoup à dire quand on leur demande comment ils pourraient influencer positivement la vie de ceux qui sont plus jeunes qu’eux. Les jeunes sont prêts à participer à des discussions sérieuses quand on leur pose des questions qui les intéressent profondément, questions qui ne sont pas uniquement centrées sur eux, mais qui touchent à des thèmes plus généraux. Par exemple, même la promesse de devenir un « leader » ou un « protagoniste » — ce qui exige une participation active — peut parfois isoler les jeunes les plus enthousiastes de leurs pairs, car, s’ils acceptent de le faire, cela peut les encourager subtilement à avoir un sentiment de supériorité. Une approche qui reconnait l’importance de la contribution de tous les jeunes, qui les encourage à contribuer au bien de leur collectivité et qui les aide à songer à leur rôle dans ce processus fait appel à une source de motivation plus profonde. Une telle conception du leadership peut aussi aider les jeunes à se rendre compte que, qu’ils décident de participer à une activité dès le début ou seulement plus tard, ils ont tous le potentiel de devenir des agents du changement social.

Bien que les enseignements bahá’ís énoncent des idéaux élevés sur la nature et les caractéristiques des jeunes, nous ne nions pas les effets que le milieu social peut avoir sur eux. Pour cette raison, notre approche comporte aussi une analyse des forces constructives et destructives qui agissent au sein de la société. Nous admettons qu’on doit aider les jeunes à adopter des « intentions claires » et que, quoique la noblesse et l’altruisme soient au nombre des nombreuses qualités innées des jeunes, celles-ci ne se manifestent pas facilement dans un contexte où les médias encouragent une conscience de soi exagérée, favorisent l’hédonisme, une passivité manifeste devant les besoins des autres — un environnement qui, par ailleurs, détermine les valeurs qu’ils garderont toute leur vie. Les conversations que nous avons avec les jeunes au sujet des forces à l’oeuvre dans leur milieu, et de l’effet qu’elles ont sur eux, les ont aidés à faire la distinction entre les qualités inhérentes à cette période de leur vie et celles qui leurs sont imposées par leur milieu social et par les médias. Par conséquent, au lieu de tenter de détourner leur attention des forces négatives qui existent dans la société, notre approche a été de les inviter à les analyser continuellement. Ces conversations servent à les sensibiliser davantage à ces forces, et à réduire leur influence.

À titre d’exemple, nos efforts pour obtenir la participation de nouveaux jeunes ont, à maintes occasions, été reçus avec indifférence et apathie, quand ils se réduisaient à une série d’invitations à participer à des activités communautaires. On peut répondre à de telles invitations par un « oui » ou par un « non », ce qui met facilement fin à la conversation. Si les jeunes n’ont pas l’occasion de prendre part à une conversation au cours de laquelle on fait ressortir l’importance du service et on explore les questions et concepts pertinents, il est naturel qu’ils ne manifestent pas une grande motivation. Une approche qui est dépourvue de ces éléments et ne cherche pas à les sensibiliser favorise la passivité, même si elle est animée de bonnes intentions.

Même quand les jeunes participent à de actions méritoires, si on ne les aide pas à réfléchir aux buts ou à leurs effets, il est possible qu’ils n’en voient pas le résultat et n’en dégagent aucune leçon. Et, avec le temps, leur engagement s’affaiblira. Par contre, une approche qui allie une exploration collective de certains concepts (par ex. l’amitié ou le service), de leur application au service, et une réflexion sur leurs actions, nous a aidés à apprendre comment nous pouvions encourager les jeunes à s’engager à agir à long terme et à participer plus à fond aux processus de transformation sociale.

Un autre concept essentiel à ce cadre de référence est celui du développement des capacités. Comment pouvons-nous aider ceux qui participent, même depuis peu, aux activités à assumer des responsabilités? Apprennent-ils à offrir la même formation et le même appui aux autres que ceux qu’ils ont reçus? Le développement des capacités implique donc deux aspects — l’étude et l’action. Nous avons appris que lorsqu’ils reçoivent une formation et qu’ils sont appuyés, et même quand ils ne font que commencer à participer, les jeunes peuvent être encouragés, à aller au-devant d’autres personnes et à tenter de les intéresser. Cela est très différent d’autres approches axées sur l’offre de biens et de services qui ont une portée limitée, car le nombre de personnes qui travaillent à étendre leur programme ne se multiple pas. Il se peut que les jeunes manifestent leur engagement pendant une certaine période de temps, mais les quelques enthousiastes se désintéresseront avec le temps s’ils ne prennent pas en main leur propre développement et ne contribuent pas à la vie de leur communauté. Communiquer une vision des possibilités offertes aux jeunes d’assumer de plus grandes responsabilités — que ce soit dans la promotion des arts, des sports et des activités récréatives, de la santé ou de l’alphabétisation, ou dans le développement de compétences et d’aptitudes — aide ces derniers à ne pas se percevoir comme des consommateurs de services, mais plutôt comme des participants actifs au processus qui leur permet de développer leur capacité de servir les autres. De cette façon, nous aidons les jeunes à acquérir dès le début la compréhension, les compétences et les qualités dont ils ont besoin pour prendre de bonnes décisions et assumer de plus grandes responsabilités. Cette compréhension, qui est le fruit de l’étude et de la pratique, est une autre source de motivation.

Nous nous efforçons aussi de mieux comprendre un autre concept, celui de la participation, car nous avons vu que des conceptions trop étroites limitaient ce que nous pouvons faire pour obtenir l’engagement des jeunes. Ici, le concept d’un continuum est utile, parce qu’il nous permet d’éviter de nous attendre à que tous participent de la même façon. Certaines personnes participeront pleinement, d’autres seulement occasionnellement. Certaines personnes participeront en écoutant attentivement, d’autres, tout en étant attentives poseront des questions et offriront plus souvent des réflexions. Quand un milieu favorise ce type de diversité et l’accepte volontiers, il est plus possible d’atteindre un plus grand nombre de personnes et de s’adapter à leurs besoins. Dans un tel cadre, la contribution de chaque personne peut changer et se renforcer avec le temps, ce qui n’est pas le cas pour les approches courantes qui normalisent la participation et mesurent l’excellence en conséquence. Créer un tel cadre n’est cependant pas chose facile. Certaines questions émergent naturellement. Comment les personnes qui se lèvent pour obtenir rapidement et avec aise l’engagement des jeunes sont-elles encouragées à le faire? Comment les participants sont-ils encouragés à aider les jeunes qui traversent des difficultés? Comment s’assure-t-on que ceux qui doivent avancer plus lentement, ou qui ne peuvent pas participer aussi souvent, sentent que leur contribution est tout de même appréciée et qu’elle est nécessaire au progrès du groupe? Comment la flexibilité et la créativité peuvent-elles aider ceux qui guident un groupe de jeunes à créer un tel cadre? Quelles sont d’autres qualités et attitudes pouvant contribuer à la capacité d’une personne de servir les personnes plus jeunes de son entourage?

S’il est utile de songer à une variété de types de participation, le concept d’un continuum aide aussi les participants à voir que l’engagement n’est pas statique. La contribution de chacun peut varier, mais ce qui est important est que chaque participant sente qu’il progresse et qu’on l’aide à progresser. Ainsi, les jeunes et les participants qui les forment et les appuient pensent et agissent en fonction du progrès. Dans un tel cadre, un participant peut facilement prendre part à un processus d’apprentissage, qu’il ait ou non de l’expérience.


La Communauté bahá’íe du Canada collabore avec un certain nombre de personnes à l’élaboration de contributions à la réflexion sur des questions importantes pour la société.

Ce document présente une réflexion qui aide à éclairer le travail de notre communauté pour participer aux discours publics du Canada. Il ne s’agit pas d’un exposé de position ou d’une déclaration officielle de la Communauté bahá’íe, mais plutôt d’un ensemble de réflexions qui s’appuient sur les enseignements bahá’ís et l’expérience de la communauté alors qu’elle s’efforce de les appliquer à l’amélioration de la société.

Vous pouvez adresser vos propres réflexions ou commentaires sur ce document, en écrivant à affairespubliques@bahai.ca.